Opportunisme meurtrier

La situation qui prévaut dans la bande de Gaza est intolérable et inacceptable. Les frappes de l’armée israélienne, destinées à rayer le Hamas palestinien de la carte, continuent de faire des victimes civiles. La stratégie militaire israélienne rappelle malheureusement le fiasco libanais de l’été 2006. Prétextant que le Hamas opère dans un espace physique et politique ou la ligne entre populations civiles et militants est indiscernable, Israël frappe sans retenue.

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Switch_1010, gaza, 2006
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La bande de Gaza est un territoire contigu de 360 km carrés où s’entassent près de 1,5 million de personnes, ce qui en fait l’endroit au monde avec la plus forte densité de population : 3823 habitants au kilomètre carré. Une fourmilière, véritablement, pilonnée par l’aviation militaire, bombardée, fermée sur elle-même, Israël contrôlant l’ensemble des frontières terrestres, maritimes et aériennes depuis 1967. Déjà au prise avec des problèmes sociaux criants, notamment un taux de chômage exorbitant, un problème chronique d’approvisionnement en eau et en nourriture, la population de la bande de Gaza vit une violence politique et militaire dont il est difficile d’envisager la fin. La fermeture des frontières par Israël suite à la prise de contrôle de la bande par le Hamas en juin 2007 fait en sorte que les vivres entrent au compte-goutte ; des tunnels de trois pieds par trois pieds, creusés sous les frontières en désespoir de cause par des palestiniens, sont sensés pouvoir approvisionner l’équivalent de la population de Montréal. De plus, ces tunnels ont été la cible des frappes israéliennes, sous prétexte qu’ils servent également à armer le Hamas, une information provenant des agences de renseignements israéliennes. La population palestinienne de la bande de Gaza vit littéralement dans une prison à ciel ouvert, affamée et assoiffée.

L’offensive militaire israélienne est justifiée de la même manière que l’attaque au Liban contre le Hezbollah à l’été 2006 l’avait été. En réplique à des tirs de roquettes par les militants du Hamas sur des populations civiles israéliennes, l’armée est déployée, et les réservistes sont rappelés. En pré-campagne électorale, la candidate du parti Kadima, Tzipi Livni, joue son avenir politique. Pressée sur sa droite par le Likoud, la stratégie politique de Livni est de démontrer une main de fer et de répondre aux attaques du Hamas avec toutes les ressources militaires à sa disposition, en contraste avec les positions plus modérées qu’elle avait adoptées par le passé lorsqu’elle s’alignait avec le Likoud. Les leçons du fiasco libanais ne semblent pas avoir été retenues ; malgré l’opprobre généralisé que certains dirigeants politiques et militaires israéliens ont subi suite à cette attaque, les stratégies pour faire cesser les attaques de Hamas ne semblent guère différer de celle employées contre le Hezbollah. Qui plus est, l’opportunisme politique de Livni doit être décrié et conspué. Se bâtir une image de ‘dure’ sur le dos des populations en otage dans la bande de Gaza relève d’une conception de la realpolitik dont les tenants et aboutissants ne garantissent rien d’autre qu’une violence aveugle.

Le cynisme de ceux et celles qui refusent de voir un règlement possible au conflit israélo-palestinien doit être dépassé. Entre les deux extrêmes formés d’une part par le sionisme exacerbé d’une minorité de colons ultra-orthodoxe et d’autre part par le militantisme fanatique d’une poignée d’extrémistes palestiniens, un espace commun doit se forger pour un dialogue constructif entre les deux peuples. La violence politique et militaire ne fera que radicaliser davantage des populations civiles des deux cotés qui, autrement, pourraient envisager une forme de consensus. L’opportunisme politique du gouvernement israélien, autant que celui de la frange armée du Hamas, qui capitalise sur la peur et la haine, doit être dénoncé. Les besoins essentiels et la sécurité de la population de la bande de Gaza doivent être assurés immédiatement. Aucun conflit politique ne se règlera au Proche-Orient tant que des extrémistes pourront capitaliser sur la misère et le désespoir dans lequel les palestiniens sont tenus par l’occupation. Des conditions de vie décentes et la fin de l’occupation israélienne sont deux conditions sans lesquelles toute tentative de règlement sera vouée à l’échec. À court terme, la fin immédiate de l’opération militaire israélienne, la réouverture des frontières de Gaza par Israël et la fin des tirs de roquettes sur les populations civiles israéliennes par le Hamas sont trois éléments sur lesquels les pressions de la communauté internationale doivent porter.

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