Il y a exactement un an, on célébrait, dans une indifférence largement partagée ici, le 400e anniversaire de la première colonie britannique d’Amérique : Jamestown, en Virginie. Je vais vous raconter une petite histoire. C’est celle qu’on raconte aux petits Ontariens quand ils font des cauchemars sur les Québécois et les autochtones. En 1763, le traité de Paris consacre la désintégration de la Nouvelle-France et la cession à l’Angleterre de toutes les terres qui la constituaient. Ensuite, les braves colons restés fidèles à la couronne anglaise après l’illégitime indépendance américaine montent au nord. 1840, la colonie du Canada est unifiée. Les méchants Canadiens-français, réduits à l’état de minorité, ne feront plus peur aux enfants. 1867, le Nouveau-Brunswick et la Nouvelle-Écosse rejoignent la province du Canada, qui devient un dominion britannique. Tout est en place pour aller voler les terres aux cruels Indiens de l’Ouest. 1982, le gouvernement canadien rapatrie sa constitution avec l’accord de la reine d’Angleterre. Les symboles de la domination coloniale ne sont toutefois pas supprimés, que les enfants se rassurent, et le représentant de la reine, le Gouverneur Général, demeure en poste. 2008, ce dernier, ou plutôt cette dernière, se rend en France pour marquer le coup d’envoi des célébrations du 400e anniversaire de la fondation de Québec. Le discours qu’elle prononce à cette occasion insiste sur l’importance de cette date dans la genèse de la nation canadienne. Les enfants sont contents.
Mauvais endroit, mauvais moment. Le Canada, qui peut aujourd’hui se targuer de constituer une nation unie et homogène, fidèle à sa majesté la reine, ce Canada-là, il est né le 13 mai 1607, à Jamestown, en Virginie.